samedi 29 mars 2014

Raul Diaz / Jetboy Grafix



Raul Diaz est un photographe spécialisé dans le Polaroïd. Il est né au Chili et part vivre aux Etats-Unis à l’âge de 5 ans. A Washington, il débute ses études dans la photographie dans une école traditionnelle prônant l’argentique. Plus tard, il part pour New York étudier dans une école d’arts visuels. En 1993, il décide de quitter les Etats-Unis car le Polaroïd n’est pas très apprécié. Il décide de s’installer à Paris.




© Raul Diaz



Ses compétences linguistiques et son talent lui permettent de travailler en tant qu’assistant photographe pour des grandes figures internationales. Il assiste notamment Jean-Baptiste Mondino, Mario Testino, Antoine Le Grand : des photographes de mode pour Vogue. Raul prend toujours des photos Polaroïds au moment des défilés des mannequins et crée ainsi son Portfolio. A cette époque, il voyage Chine, aux Seychelles, en Afrique du Sud.

« Avec la photo Polaroïd, il n’y a pas de travail de post-production, pas de frais en plus pour les tirages et on peut créer une histoire tout de suite », exprime Raul Diaz. Cette instantanéité lui permet de publier des séquences de photos pour les magazines Biba et Jalouse. Dans les années 1980, le papier ne coûte pas cher et Raul Diaz commence à en faire un stock. Dès que le numérique prend le dessus sur l’argentique, il décide alors de chiner et collectionne les appareils Polaroïds de toutes sortes. Il crée son Portfolio et scanne ses Polaroïds sans les bordures afin de montrer le flou et la douceur naturelle de la photo, lui donnant un style impressionniste.


Aujourd’hui, c’est difficile de faire concurrence au numérique, il faut suivre la technologie mais Raul Diaz est un fidèle passionné de Polaroïd. Ainsi, il ouvre sa boutique En Face en 2008, où il vend des appareils Polaroïds. Il est le premier à vendre du papier Impossible. Dans sa boutique-restaurant, il vend les créations d’artistes variés et organise régulièrement des vernissages et expositions.



EN FACE : 8 rue Gambey 75011 Paris




© Raul Diaz


Nan Goldin



Nan Goldin est une photographe américaine qui grandit dans le Maryland, dans une famille bourgeoise. À quinze ans elle s’initie à la photographie, poussée par un de ses professeurs à Boston où elle intègre l’Ecole des Beaux Arts. Elle rencontre ainsi le photographe David Armstrong, drag queen : elle côtoie alors un milieu marginalisé et le photographie tout au long de sa vie. « Ce qui m’intéressait le plus c’est de photographier le comportement physiques des gens, leur sexualité, leur identité sexuelle. Dès le début de mon travaille sur les travestis, je les percevais déjà comme un troisième sexe ».




© Nan Goldin








Brutes et sans fard, ses images confrontent le spectateur à l’intime, au dérangeant, sans pour autant tomber dans le voyeurisme. Comme par effraction dans un monde en marge, son regard décèle la vie telle qu'elle est, sans censures. Intéressée par le comportement physique des gens, l’artiste travaille principalement sur les thèmes de la drogue, la violence, le sexe et l’angoisse. Elle rend compte de la richesse humaine à chaque instant, à portée du regard. En sublimant l’intime, elle photographie la douleur et la difficulté de survivre. En effet, ses clichés soulignent un passé difficile : une vie marquée par le suicide de sa sœur. « J’ai commencé à prendre des photos à cause du suicide de ma soeur. Je l’ai perdue et je suis devenue obsédée par l’idée de ne plus jamais perdre le souvenir de personne. »

Ses photographies sont à l’image de sa propre vie : spontanée et impulsive. Ce sont des images prises sur le vif. Elle ira même jusqu’à se photographier peu après avoir été battue par son petit ami de l’époque. Des blessures qui auraient pu lui faire perdre la vue.

Comment parler de soi et des autres au travers des corps et de la lumière ? « The Ballad of  Sexual Dependency » accumule les diapositives prises sur l'existence de la jeune artiste, sur sa vie de famille, ses amis et modèles atteints du sida, qu’elle suit jusqu’à leur mort. Cette exposition est constituée de plus de 800 diapositives projetées en boucle, accompagnées de musiques d’inspirations diverses telles que James Brown, Maria Callas ou encore le Velvet Underground.

La musique aura touché Nan Goldin. Elle séjourne à Londres et se familiarise avec la culture Punk et la tendance « no future » des groupes comme les Sex Pistols et Clash. Nan Goldin a vécu à New York dans un quartier populaire, travaillant en tant que barmaid. Ainsi elle a commencé à exposer ses photographies. Les projections des premières versions du diaporama de la « Ballade » au Rafiks Underground Cinéma, au Mudd Club ou au Maggie Smith's Tin Pan Alley de Times Square intéressent les organisateurs de festivals et les musées en quête de talents et de vision neuves.

La photographe passe du noir et blanc à des couleurs saturées plongées dans une lumière artificielle. Elle joue sur l’éclairage, et attribue à ces clichés une grande sensualité, mêlant le fond et la forme. « Pendant des années mon travail a traité de la dépendance sexuelle (…) je suis obsédée par le fait qu’on puisse être attiré par quelqu’un qui ne vous convient pas tant sur le plan affectif que sur le plan intellectuel ». Derrière un sombre décor, elle réussit à rendre hommage à la beauté et à la nature humaine.




© Nan Goldin



L’artiste vit à présent entre Londres et Paris. Lauréate du Prix Hasselblad en 2007, elle expose à Arles et au jeu de Paume. En 2001, elle présente « Nan Goldin, le feu follet » au Centre Pompidou. Elle raconte l'histoire de sa vie noctambule au coeur de la contre-culture américaine.
Dernièrement, en septembre 2013, Sabine Lidl retrace le parcours de Nan Goldin dans son documentaire « I remember your face » lors du 9ème festival de Zurich. Pour ce portrait, la réalisatrice revient sur le passé sulfureux de Nan Goldin, une artiste atypique qui n’est pas prête de s’assagir. Elle sort son nouveau livre Eden and After en mars 2014 où elle photographie les enfants de ses amis de leur naissance à l’adolescence.

dimanche 23 mars 2014

Dorothée Smith


« je photographie pour composer des fantômes »



Dorothée Smith est née en 1985 et étudie en khâgne puis obtient un master de philosophie
contemporaine à la Sorbonne avant d'intégrer l'Ecole Nationale Supérieure de la Photographie d'Arles. Résidente du Fresnoy en 2010, elle explore la question du genre et du transgenre à travers ses séries de photographies et installations vidéo. Elle mêle portraits de beautés androgynes à des photographies de paysages mystérieux dans sa série « Löyly », qui signifie « vapeur » en finnois. Elle évoque la transformation de la matière en relation avec l’identité sexuelle.

Son travail consiste en une observation des constructions, déconstructions et performativités : elle mène des recherches sur l’identité en échappant à toute catégorisation et fascine. Elle soulève des questions importantes en photographiant avec douceur ses portraits. « Dorothée Smith invente son propre mode d’exister et son propre univers, crée une écriture photographique singulière, tandis qu’elle joue de ses avatars sur la toile, construit un véritable réseau protéiforme et amical où se retrouvent les corps qui hésitent entre le masculin et le féminin, les identités suspendues, en devenir. La question originaire est celle du passage, du transit, de la transition. De l’entre-deux, cet espace inassignable et indéterminé qui ouvre à tous les possibles. »

La jeune photographe et vidéaste s’interroge sur la notion de féminité et prend des clichés de femmes transgenres, des personnes à l’identité trouble, ambiguë qui ne permettent pas de les assigner à un genre. Dorothée Smith abandonne cette notion de binarité du genre. Elle présente son projet « C19H28O2 » (Agnès) en alliant vidéo et sculpture. « L’identité est le résultat d’un travail en interaction entre celui qui émet les indices de genre et celui qui les perçoit, les ratifie » (Kessler et McKenna). Garfinkel, lui, parle d’idée d’accomplissement car Agnès est une personne hermaphrodite née homme souhaitant devenir femme. L’installation interroge donc la matérialité de la notion de genre sur laquelle repose en grande partie l’ordre social et son organisation (familiale, économique, éducative…). La thématique de l’identité est récurrente dans le travail de Dorothée Smith.

Grâce aux artistes comme Christer Strömholm et son portrait troublant « Jacky », Nan Goldin et son exposition « Heartbeat » ou encore Matthew Barney au Musée d’Art Moderne de Paris en 2003, l’artiste cinéaste et photographe est inspirée. Elle découvre cette dimension de construction de soi en passant par le medium photographique. Aujourd’hui, elle continue à explorer le concept de transition, d’identité et travaille en collaboration avec une équipe de chercheurs de l'Ircica/CNRS.

En 2006, elle participe au Mois de la Photo-OFF à Paris. Elle fonde et dirige le collectif L'Evadée en 2009, et intègre le projet Zerkalo en 2011. Représentée par la galerie Les Filles du Calvaire, elle expose au Musée de la photographie d’Helsinki et au Pavillon Vendôme à Clichy en 2014.






© Dorothée Smith

© Dorothée Smith

© Dorothée Smith